Année : 2020 Durée : 12'

Texte : Poèmes de Benoît Gréan

Genre : Mélodie accompagnée

Effectif : Pour soprano, ténor et piano

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Rome, rideau
Treize mélodies minuscules

Notice :

Il m'a d'abord fallu choisir quelques poèmes dans la profusion que me proposait Benoît Gréan.
Mon amour pour la ville de Rome a été l'impulsion.
La vision du poète n'était pas celle d'une Rome touristique, mais celle de cette Rome secrète du marcheur sans projet...
Ensuite, la difficulté était de mettre en musique un texte déjà musique.
Il me semblait que tout était contenu dans ces mots détachés de la phrase, isolés, gardant ainsi une présence magique.
Il me fallait trouver une thématique.
Je me suis alors proposé un paysage:
marbre
mort
ruines
ROME
arbres
fleurs
nature
puis, trois aspects de l'être humain:
l'éphèbe qui marche pieds nus, sans abri, vivant, puis dormant

Au réveil il était pas d'heure

Je décidais alors que la forme générale de ce parcours mélodique serait le palindrôme, avec au centre la puissance du Dôme de Saint-Pierre: stabilité, touchée de légèreté (les citrons à point sur les terrasses...)
Enfin, j'ai croqué dans les mots qui eux-mêmes suggèrent la couleur, la consistance, l'épaisseur ou la transparence, la vie ou la mort souvent côtoyée par l'humour.

J'ai joué avec le poète sur les allitérations, et j'ai utilisé les écritures vocales et pianistiques qui racontaient ma propre traversée de Rome.
Le palindrôme se termine en "miroir":

Jamais remettre à l'avant-veille ce que peut faire un lendemain.

1
L'oreille contre le marbre
confident des dieux morts

2
Rester de marbre
en la ville antique sous tant d'histoire et de mots vieux
la mort sans rien résoudre envahit plus qu'elle ne détruit

3
Fragments d'aube ruineuse
aux versants de l'abîme florissant
Rome émerge entre empereur et chat
belle irrémédiablement

4
Pèse à peine soleil beige
sur un forum fourbu
paisse une paix vengeresse
dans la pénombre d'arbres tors

5
D'un pin parasol attendrir l'immobilité torrentielle
dépeigner les sourcils d'un César
portrait d'éphèbe en vieille garde

6
Tant d'innocence à errer déchaussé
parmi les marbres et reliques
pied grec voire égyptien n'empêche
un nez joliment césarien

7
Il y a lune et soleil
le dôme de Saint-Pierre planant dessus les toits du faux hiver romain
mais surtout des citrons à point sur les terrasses

8
La cigale au cyprès scie le silence
s'il me souvient dans la chaleur béante du sac de Rome

9
Catastrophes en sourdine
ici fleurit
la bougainvillée mauve
même en janvier

10
Il dort à point sous sarcophage
sans-abri survivant dans les soutes de Rome
l'âge rompu sévit à perte
au réveil il était pas d'heure

11
Rideau de pins pleureurs
s'adosse un soleil pâle
goutte à goutte hiver passe
épicentre du vide

12
La nuit d'aplomb sur sommeil de plomb
si rassurante une présence hante l'article du néant
nul souvenir au lendemain

13
Jamais remettre à l'avant-veille ce que peut faire un lendemain
les bras vacants nuque à tout vent
regard perçant voûte de brume